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SEE - L'Automatique à la fin du millénaire.
Septembre 19999 - Contribution du Club 18 au rapport annuel de la SEE

Les origines de l'Automatique
Lors de la découverte de l'électricité, des séances d'électrisation volontaires démontraient sa réalité et sa puissance. Rien de tel pour l'Automatique qui n'est pas une science fondamentale de notre univers physique, mais un élément primordial de la vie de tous les jours. L'Automatique a toujours fait partie de notre vie. Dès que l'on influence la façon dont une activité est modifiée par un événement extérieur sans intervention manuelle, on fait de l'Automatique : Le piège qui se referme sur l'animal attiré par un appât, le réservoir de la chasse d'eau qui se remplit sans déborder après chaque utilisation, c'est de l'Automatique. Ce dernier quart de siècle a vu la naissance de nouveaux métiers dédiés à l'Automatique, rapidement impliqués dans l'évolution des technologies de l'information : Contrôle de Procédé, Régulation Automatique, Cybernétique, Robotique, Productique, Domotique... Nous n'utiliserons ici que le terme "Automatique", sensé couvrir tous ces métiers. Au début, les électriciens et les micro-mécaniciens (voire les horlogers), assuraient le développement et la maintenance des systèmes de contrôle des équipements de production. Les électriciens sont devenus des Automaticiens et les micro-mécaniciens des Régleurs ou Instrumentistes. Les uns ont câblé des relais électromécaniques puis développé et programmé les Automates Programmables. Les autres ont étalonné les capteurs et actionneurs analogiques, réglé les dispositifs de calcul pneumatiques, hydrauliques, électroniques puis conçu et configuré les Système Numériques de Contrôle Commande. Aujourd'hui, on ne parle plus que d'Automaticiens. La technologie et le départ à la retraite des pionniers achèvent lentement la convergence des deux types de systèmes.

La situation technologique
Au seuil du nouveau millénaire, la technologie a connu des progrès spectaculaires : Les microprocesseurs toujours plus puissants ont pris le relais des systèmes pneumatiques, hydrauliques, électromécaniques ou électroniques analogiques. Les réseaux informatiques offrent des capacités de communication en constante augmentation, à comparer aux tubes de cuivre ou plastique et aux liaisons électriques utilisés autrefois pour véhiculer l'information.

La régulation du niveau d'eau d'une chaudière au Vietnam assurée par deux hommes, l'un surveillant la colonne transparente de l'indicateur de niveau, l'autre manoeuvrant la vanne d'eau, les deux communiquant par le son du gong ne peut être comparée au contrôle complexe des chaudières de nos centrales modernes. Pourtant, ces progrès n'ont pas encore transformé radicalement la conduite, la sûreté et la flexibilité des installations et ont même eu des conséquences néfastes sur la façon de concevoir l'automatisme : - Les dispositifs mis à disposition de l'opérateur pour superviser le fonctionnement des unités ont une efficacité ergonomique souvent inférieure aux tableaux de commande d'autrefois. - Les comportements de l'automatisme dans les situations anormales sont difficilement compensés par l'opérateur mal informé par une information surabondante et insuffisamment traitée. - La conception rigide de l'automatisme limite la flexibilité inhérente du système physique de production et les évolutions du procédé nécessitent des modifications profondes de l'automatisme. - L'ingénierie du système de contrôle-commande, libérée de la plupart des contraintes matérielles par le logiciel, a perdu beaucoup de sa rigueur. Les modifications ne sont pas gérées et la qualité du système se dégrade rapidement.

Ces remarques ne s'appliquent bien sûr pas à tous les systèmes existants, mais la situation ainsi décrite est largement majoritaire. Parmi les causes de cette situation, le décalage entre l'évolution de la technologie et son assimilation pratique par les hommes. Pour y faire face, la réduction du temps de travail offre l'occasion de consacrer une part beaucoup plus significative à la formation continue.

L'Automatique intégrée
La technologie continuera à évoluer, et il est difficile d'imaginer les moyens utilisables pour construire les automatismes de demain. Les grands axes sont tracés et nous sommes au début d'une révolution culturelle plus importante que la technologie elle-même : La fin de ce millénaire a vu la naissance de l'Automatique industrielle et des technologies de l'information qui ont permis son développement. Le début du prochain millénaire sera celui de sa maturité. L'automatisme ne sera plus une entité autonome, mais fera partie intégrante du système de production. On distinguera le contrôle des équipements du contrôle du procédé de fabrication luimême, les entités de contrôle communiqueront entre elles de façon simple et standardisée Le rôle de l'automaticien au sens strict va décroître. Il ne sera plus seul pour concevoir et maintenir les composants d'automatisme du système de production. L'Automatique devient partie intégrante des métiers qu'il supportait autrefois Grâce à l'Automatique, l'opérateur ne sera plus un exploitant critique et insatisfait, mais un acteur fondamental du système de production dans ses phases de conception, d'exploitation et de maintenance et un participant responsable aux objectifs de l'entreprise. Le passé
Opérateur : Responsable de la bonne marche de l'installation, exécutant du plan de production

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L'avenir proche (le présent ?)
Opérateur : Responsable de la performance de la production

Automatisme de l'ensemble des équipements et du procédé Responsabilité : automaticien

Automatisme du procédé de fabrication indépendant des équipements. Responsabilité : Ingénieur Procédé

Procédé

Procédé
Automatisme Equipement Responsabilité : Automaticien, fournisseur de l'équipement ? Equipement physique : machine, cellule procédé Automatisme Equipement Responsabilité : Automaticien, fournisseur de l'équipement ? Equipement physique : machine, cellule procédé

Cette révolution a commencé, les travaux en cours fournissent déjà une matière importante utilisable : La norme IEC 61158 (réseaux de communication et bus de terrain), au-delà des conflits d'intérêt qu'elle a fait naître, apporte au concept de "Bus de Terrain" des notions de communication évoluée qui préfigurent l'ossature de la communication à l'intérieur du système de production L'OPC (OLE for Process Control, interopérabilité des applications distantes) agissant en dehors de la normalisation, vise à fournir l'ensemble des services nécessaires pour assurer le transfert de l'information entre composants. Elle s'appuie sur la technologie Microsoft, mais son succès est tel que l'OAG travaille sur une implémentation compatible CORBA. La norme IEC 61131-3 (Langages de programmation pour l'Automatique) définit des langages puissants qui libèrent la créativité des concepteurs de composants d'automatisme de base La norme IEC 61512 / ANSI-ISA S88 (Contrôle des procédés par lots), développée initialement pour les procédés discontinus, propose un modèle conceptuel qui sépare le contrôle des équipements (indépendant du produit à fabriquer, basé sur les ressources physiques du système de production) du procédé lié au produit à fabriquer. On peut considérer ses concept comme un niveau supérieur de l'automatisme capable de piloter les composants élémentaires attachés aux équipements.

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La norme ISA S95 (intégration Système d'Entreprise ­ Système de contrôle) prend acte de la spécificité du système de production et propose un modèle d'intégration qui facilitera entre autres la communication de l'automatisme avec l'Entreprise dans son ensemble.

On peut schématiser le chemin à accomplir par la figure suivante :
Automatisme idéal

Flexibilit

Automatisme intégré

é

Exploitation manuelle

Capabilité
Automatisme Classique

Complexité Le système de production automatisé peut être analysé sous les 3 composantes suivantes : La capabilité est l'aptitude à exploiter les ressources de l'unité pour fabriquer le produit désiré : Capacité et Fonctionnalités. L'Automatique en est le vecteur indispensable, la plupart des processus de production ne peuvent être exécutés entièrement manuellement. La flexibilité est l'aptitude du système de production à exploiter des procédés de fabrication différents sans reconception du système. L'exploitation manuelle est idéale sous cet angle. Dans le meilleur des cas, l'Automatique "classique" restreint les facultés inhérentes du système de production. Dans le pire des cas, l'installation est "mono-produit". La complexité de l'Automatique est le prix à payer pour supporter la capabilité et la flexibilité du système de production.

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L'Automatique intégrée doit assurer la flexibilité et supporter la capabilité inhérente du système de production d'une façon simple.

Conclusion
L'Automatique atteint l'âge de raison. Elle n'est plus le domaine réservé de l'automaticien débordé par des responsabilités hors de son propos, le facteur perturbant des démarrages, le siège des dysfonctionnements. L'Automatique s'intègre réellement dans l'ingénierie, chaque acteur du projet y prend sa part de responsabilité. L'Automaticien va-t-il disparaître ? L'informatique, qui a évolué beaucoup plus rapidement, nous montre une spécialisation accrue de métiers. Seuls ceux qui font un effort considérable pour se maintenir à niveau avec l'état de la technologie survivent. L'Automatique est un domaine beaucoup plus calme, mais cette spécialisation est déjà dans les faits : ergonomie du poste de conduite, réseaux, sûreté de fonctionnement, câblage, instruments, réglage... L'Automaticien homme-orchestre capable d'intervenir dans tous les aspects du système a déjà disparu. A coté de ces spécialistes "technologiques", on ne trouvera plus d'ingénieurs d'applications capables d'appréhender toutes les contraintes du procédé, mais au contraire des spécialistes du procédé capables de définir les besoins d'Automatique et de les mettre en oeuvre. Aujourd'hui déjà, les systèmes qui donnent satisfaction sont ceux dont les applications ont été réalisées sous la responsabilité directe du site de production, et non délégués sans directives et contrôles précis aux intervenants extérieurs. La rédaction des spécifications et la validation prennent une part de plus en plus importante dans les projets. L'industrie pharmaceutique, par ailleurs relativement peu automatisée, est pionnière dans ce domaine avec des projets rigoureusement encadrés par les recommandations FDA ou GAMP. Le groupe de travail "Spécification

de la conduite des Systèmes de Production » de l'EXERA travaille également sur ce sujet.


Johann Sebastian Bach. the music closest to silence, closest, in spite of its being so highly organized, to pure, one-hundred-degree proof Spirit" (Aldous Huxley, Island)